Les contrats de transport contiennent généralement une clause qui plafonne la responsabilité du transporteur en cas de perte ou de vol de la marchandise. Et à défaut d’une telle clause, c’est le contrat type applicable aux transports routiers de marchandises qui s’applique et qui limite, lui aussi, la responsabilité du transporteur.
Ce n’est que si le transporteur a commis une faute inexcusable que son client peut obtenir la réparation intégrale de son préjudice. La faute inexcusable étant définie par la loi comme « la faute délibérée qui implique la conscience de la probabilité du dommage et son acceptation téméraire sans raison valable ». Ainsi, une simple négligence du transporteur n’est pas constitutive d’une faute inexcusable.
Une telle faute est donc rarement reconnue par les juges. Une affaire récente en témoigne à nouveau.
Quand la faute inexcusable du transporteur n’est pas établie
Un transporteur avait été chargé par un laboratoire pharmaceutique d’acheminer des produits pharmaceutiques périssables à une température qui devait être obligatoirement comprise entre +2° et +8°. Mais pendant le transport, une partie de ces produits avait été exposée à une température négative en raison d’un dysfonctionnement du système frigorifique. Le transporteur avait alors indemnisé le laboratoire d’une partie seulement du préjudice car le contrat prévoyait une limitation de responsabilité.
Le laboratoire, plus précisément son assureur qui avait en justice contre le transporteur, avait estimé que cette clause limitative de responsabilité n’avait pas à s’appliquer car le transporteur avait, selon lui, commis une faute inexcusable. Mais les juges n’ont pas été de cet avis. En effet, ils ont constaté :
- d’une part, que le véhicule de transport était constitué de trois compartiments dont les températures étaient préréglées, le chauffeur n’ayant pas pris l’initiative ou pu modifier ces températures et une telle demande ne lui ayant pas été faite ;
- d’autre part, qu’après avoir relevé l’anomalie des températures renfermant les produits dans le compartiment frigorifique réglé à +5°, le chauffeur avait arrêté une première fois le véhicule et appelé en urgence son employeur, lequel lui avait indiqué de redémarrer le groupe de réfrigération, puis, ayant relevé une nouvelle chute des températures en dessous de zéro degré, le chauffeur avait, à nouveau, consulté en urgence son employeur qui lui avait prescrit, cette fois, de stopper le groupe de réfrigération, ce qu’il avait déclaré avoir fait ;
- et enfin, que le véhicule avait été mis en circulation la première fois moins de deux ans avant la survenance du sinistre, qu’il avait fait l’objet d’une attestation de conformité sanitaire et que les interventions sur le dispositif frigorifique attestaient de la précaution que le transporteur avait prise pour respecter la destination de son véhicule.
Cassation commerciale, 25 septembre 2019, n° 18-12265
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